Plusieurs opposants politiques à Nicolas Sarkozy affirment avoir été menacés par l’ancien ministre de l’Intérieur pour les réduire au silence.
Depuis plusieurs mois, des témoignages anonymes circulaient dans les milieux journalistiques sur les menaces que des proches de Nicolas Sarkozy adressaient aux auteurs d’articles critiques. Parmi les méthodes qui seraient employées pour faire taire un opposant : les pressions économiques sur un journal ou la révélation du nom de sa maîtresse à sa femme. Mais petit à petit, c’est en public que les langues ses délient.
Ainsi, le journaliste Joseph Macé-Scaron a raconté lundi 16 avril 2007 sur RTL comment Nicolas Sarkozy l’avait menacé lorsqu’il était directeur du Figaro-Magazine : « J’ai vu Sarkozy qui était en situation de puissance et non pas de séduction, et je peux vous dire que la menace, le "on se souviendra de toi", l’index pointé, le "on te cassera", je l’ai entendu, moi, Joseph Macé-Scaron, en tant que journaliste du Figaro-Magazine, je parle en connaissance de cause. »
Le ministre de l’Égalité des chances, Azouz Begag, qui a récemment démissionné pour soutenir François Bayrou, a lui aussi rapporté les menaces et les pressions qu’il a reçues de la part de Nicolas Sarkozy alors qu’il s’y opposait en conseil des ministres. Il déclarait mercredi 17 avril au quotidien espagnol El País : « Sarkozy avait beaucoup de pouvoir. Trop. Mes divergences avec lui ont surgit au moment des violences dans les banlieues, quand il a prononcé ces paroles, insultantes, choquantes ; quand il a appelé "racailles" les jeunes et dit qu’il nettoierait les rues au Kärcher. Moi, qui viens de l’immigration, je me suis vu obligé de sortir de ma réserve et dire que je ne pouvais pas accepter ce langage. Il m’a menacé et a utilisé tout son pouvoir politique et médiatique pour me faire disparaître. Azouz Begag n’existe pas, était la consigne. Les journaux et toutes les grandes chaînes de télévision me passèrent sous silence. » Dans un livre sorti le 11 avril, Un mouton noir dans la baignoire, Azouz Begag rapporte les propos que lui a alors tenu Nicolas Sarkozy : « Tu es un connard, un déloyal, un salaud ! Je vais te casser la gueule ! J’en ai rien à foutre de tes explications ! Tu vas faire une dépêche à l’AFP pour t’excuser, sinon je te casse la gueule. »
Par ailleurs, l’utilisation de la police pour réduire au silence des manifestants lors des déplacements de Nicolas Sarkozy devient une pratique courante. Dernier abus de pouvoir en date : des salariés menacés de licenciements empêchés par la police de se rendre à un meeting du candidat. Le Monde du 18 avril rapporte l’interception par la police pendant plusieurs heures de deux cars de manifestants se dirigeant vers le lieu d’un meeting de Nicolas Sarkozy à Meaux. « Ils étaient plus nombreux que nous, explique un syndicaliste. On a eu le droit pendant deux heures et demi à une garde à vue en pleine campagne, sans aucun motif. »
Ces comportements sont indignes d’un candidat à l’élection présidentielle d’une grande démocratie. De récents propos viennent renforcer l’inquiétude qu’ils suscitent. En pleine campagne électorale, l’ancien ministre de l’Intérieur n’a pas hésité à affirmer son admiration pour le coup d’État de 1992 en Algérie. Jeudi 12 avril, au micro d’Europe 1, il félicitait les putchistes algériens : « l’Algérie avait été très courageuse au début des années 90 en interrompant le processus démocratique », affirmait-il.